Interview réalisée en décembre 2020
En cette nouvelle période de crise, de quelle manière êtes-vous mobilisés ?
Nous n’avons pas modifié notre système de travail. C’est une mobilisation totale sachant que la situation n’est pas la même que lors de la première vague. Les gens par exemple circulent comme avant, ce qui n’était pas le cas au premier confinement où il n’y avait presque personne sur les routes. Nos effectifs sont toujours les mêmes, quatre policiers municipaux et deux agents de surveillance de la voie publique (ASVP). Mais nous devons faire preuve d’encore plus d’implication, de flexibilité et de réactivité, sachant que les collègues avaient déjà beaucoup donné en début d’année et qu’ils doivent encore plus donner, avec des absences éventuelles. Nous avons déjà eu des agents en quarantaine et ma plus grosse crainte, c’est de voir mon effectif fondre comme neige au soleil. Il a parfois fallu composer du jour au lendemain, et tous ont toujours répondu présents.
Quelles sont vos missions ? Comment pouvez-vous continuer à protéger les usagers ?
Nous effectuons nos missions habituelles mais dans un contexte particulier. Les contrôles sont ainsi plus compliqués, car les motifs de déplacements sont nombreux. Il est difficile notamment de vérifier la véracité des justificatifs de déplacement. Tout le monde sort pour faire des courses, aller au travail, se balader…Pour les enterrements par exemple, il y a des restrictions de nombre de personnes mais pas de distance. Nous sécurisons la voie publique et les commerces qui comptent beaucoup sur nous pour intervenir et faire appliquer les gestes barrière. Nous sécurisons aussi les édifices religieux, en collaboration avec la gendarmerie, dans le cadre du terrorisme, car à la crise sanitaire actuelle s’ajoute en parallèle le risque attentat qui nous mobilise.
Nous avons également réenclenché les astreintes pour la surveillance de la fermeture des cercueils, dans une moindre mesure que lors du premier confinement durant lequel nous avons connu beaucoup de décès. Ce que nous vivons aujourd’hui en une semaine, nous le vivions en un seul jour. Même si nous avons fini notre service, nous revenons donc pour ces astreintes. Avant tout, notre mission est d’assurer la sécurité pour que les gens puissent à nouveau vivre normalement.
Quelles contraintes rencontrez-vous et qu’avez-vous mis en place face à cette crise sanitaire qui perdure ?
Nous devons nous adapter au fur et à mesure que les textes paraissent, presque du jour au lendemain, ce qui est pour nous lourd et compliqué. La vente de sapins avait par exemple été annoncée à partir du 20 novembre. Tous les vendeurs nous appelaient pour connaître les modalités, alors que nous n’avions eu connaissance du texte qu’à partir du 19 novembre. Pour le marché en plein air, les deux ASVP ont été omniprésentes pour remettre en place les protocoles du premier déconfinement avec contrôles aux entrées, surveillance du respect du port du masque par tous… Il y a eu également un gros travail d’explication puisque, pour les marchés, seuls étaient autorisés les commerces alimentaires ou proposant la vente de graines, semences et plants d’espèces fruitières ou légumières.
Quels changements percevez-vous depuis les derniers mois et par rapport à la première vague ?
Nous avons des dizaines et des dizaines d’appels à gérer, même de personnes qui ne sont pas d’Altkirch. Il y a tellement de changements que la population n’arrive pas à suivre. Ils viennent au poste ou nous arrêtent dans la rue avec des questions très précises, les concernant individuellement, sur ce qu’ils peuvent ou ne peuvent pas faire. Les personnes âgées notamment ont besoin de comprendre. Certaines personnes sont aussi moins conciliantes, elles semblent être à bout. Par exemple, une situation a dégénéré en violence dans un commerce, la personne ne voulant pas porter le masque. Ce n’est pas une surprise, ni un cas isolé. Auparavant, nous pouvions essayer de parler et négocier, aujourd’hui ce n’est plus le cas. On passe du blanc au noir et on ressent une certaine animosité vis-à-vis des forces de l’ordre. Mais nous ne sommes pas là pour embêter les gens.
Qu’est-ce que cette crise a modifié et va changer de façon pérenne ?
Cette crise dure déjà quasiment depuis un an et c’est de plus en plus lourd pour nous. Les policiers ne sont pas des surhommes et la fatigue s’installe au fur et à mesure des mois écoulés. De plus le contexte général actuel que l’on connait envers les forces de l’ordre n’aide pas. Un jour, nous sommes applaudis par la population et le lendemain nous sommes décriés voire agressés verbalement et physiquement. J’espère que la tension va diminuer dans le temps, qu’il y aura aussi une prise de conscience pour la suite. Nous sommes exposés mais nos familles également. Et on l’oublie mais le risque de contamination est toujours bien là, ce qui ajoute du stress. Ce qui ne changera pas, c’est que le policier municipal est au plus près de la population, encore plus en ces temps. Notre devise, c’est servir. C’est aussi défendre le citoyen et faire appliquer les règles.
Vous sentez-vous protégés dans votre collectivité ?
La mairie a mis en œuvre tous les moyens de protection, dès la première vague et continue d’être à l’écoute. Nous portons toujours les masques par exemple, même si en cette période où ils deviennent rapidement humides, cela devient très contraignant.
Article publié le 21/12/2020