Des freins réels à une démarche non-universelle
Suscitant tantôt l’engouement, tantôt le dédain, les modes de travail collaboratif restent peu expérimentés dans les collectivités territoriales. Pourtant, la plupart des acteurs de terrain appellent de leurs vœux à plus d’horizontalité et de coopération. Convaincu que la modernisation de l’action publique passera par une meilleure mise en commun de toutes les forces issues du terrain, l’Observatoire MNT, présidé par Laurent Besozzi, a souhaité savoir où en étaient les collectivités. Ainsi, en partenariat avec l’INET, quatre élèves administratrices territoriales, Sandrine Bernard, Charlotte Corrius, Eugénie Jamin-Mallet et Claire Piecuch, ont conduit une étude qui examine les bénéfices, les limites et les clés de succès du mode de travail collaboratif.
Comme le rappelle l’étude de l’Observatoire MNT, les modes de travail collaboratif recouvrent une large palette de pratiques qui peuvent aller d’une simple coordination, au partage du pouvoir décisionnel. Même si à première vue, cette approche parait peu compatible avec l’organisation traditionnelle des collectivités (place des élus, rôle de la hiérarchie, fonctionnement en silos…), de plus en plus d’entre elles l’ont testée avec succès. Ce guide managérial de l’Observatoire MNT s’appuie sur les expériences innovantes entreprises par des collectivités et des structures variées par leur taille et leur implantation territoriale. Le tout est complété par des témoignages issus de 28 entretiens individuels menés dans 21 structures, et quatre études de cas approfondies.
Plusieurs freins au déploiement de ce type d’organisation en ressortent, tel que le caractère indispensable d’une mobilisation de tous les acteurs, à tous les niveaux hiérarchiques (élus comme directeurs). D’autre part, les modes de travail collaboratif sont complexes à déployer, il n’existe pas de modèle "clé en main", c’est pourquoi ils exigent accompagnement et méthode. Enfin, la mise en place de tels modes de travail suppose un important coût humain et financier.
Une opportunité de réinventer le service public
Heureusement, un tel investissement comporte de précieux bénéfices et ces freins sont surmontables ! L’Observatoire MNT propose dans son Cahier douze recommandations, clés pour une démarche collaborative réussie. Selon l’étude, le succès du déploiement d’une telle démarche réside dans la préparation en amont, c’est-à-dire par la définition de l’objectif et par le cadrage. Il s’agit d’offrir un environnement de travail propice au groupe et d’assurer la durabilité de ce mode de fonctionnement.
Grâce à des exemples concrets, l’étude démontre enfin que le collaboratif permet aux collectivités qui l’ont testé de gagner en efficacité, en agilité et en proximité, de sorte à mieux accompagner l’usager et répondre à ses besoins. En termes RH, il offre aux collaborateurs un principe de confiance, entre contrôles raisonnés et droit à l’erreur. Une plus grande autonomie libère l’esprit créatif et l’innovation, favorisant engagement et attractivité.
Dans un contexte démocratique de forte abstention et de critiques nourries envers la sphère publique en général, ce type d’organisation constitue en effet une opportunité pour mieux saisir les enjeux locaux, réinventer les services publics et trouver de nouvelles solutions, en cassant les silos fonctionnels et en donnant la parole à davantage de collaborateurs, cadres et non cadres.
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Article publié le 07/12/2023