À l’accueil des mairies ou dans les cuisines d’un collège, entre les travées d’une bibliothèque ou au cœur des espaces verts, le balai à la main ou le bras soutenant un senior… Quel que soit le métier inscrit aux 250 listés par le Répertoire du CNFPT (centre national de la fonction publique territorial), les agents territoriaux sont tous animés d’une même raison d’être : agir au plus près des usagers, pour les usagers !
Cette capacité d’ajustement constitue aussi un trésor culturel historique dans lequel puiser pour faire face aux forts enjeux d’adaptation actuels

Utiles au quotidien
Utiles donc, ils en sont convaincus, tandis qu’ils mettent chaque jour leur engagement à l’épreuve du concret. D’abord parce que, somme toute, ne sont-ils pas ceux qui sont et font le territoire ? « En fait, on n’y pense jamais comme ça, parce qu’on n’a pas le recul. Mais entre les routes, les éclairages, les écoles, le théâtre, le marché, les animations, la formation professionnelle, la petite enfance, les maisons de retraite, le développement économique, les parcs, tous les aspects de la vie d’une personne sont touchés par notre action », rappelle ainsi cet agent métropolitain de catégorie B, presque étonné lui-même de ce formidable pouvoir.
Transmettre aux jeunes à force d’expliquer (catégorie C, commune de plus de 30 000 habitants), amener des artistes à se découvrir (catégorie B, conseil régional, culture), imaginer le pont avec les gens dessus (catégorie C - conseil départemental)… Tous puisent ainsi leur motivation à cette même détermination : « apporter quelque chose à quelqu’un dans sa vie de tous les jours ».
Utiles contre la violence du monde
Mais en six ans, le « service à la personne » ne constitue plus le référentiel majeur identifié lors d’une précédente étude de l’OST, « Dans la peau des territoriaux ». « Avoir des effets sur la vie des gens », comme le résume ce jeune agent régional, emprunte désormais un nouveau sens. Car, de menaces environnementales en terrorisme et de chômage en inégalités, le monde n’est plus un long fleuve tranquille. Et, tandis que l’humanité renoue ainsi avec sa vulnérabilité, le local émerge comme le dernier espace de sécurité, un « territoire du quotidien » où s’ancrer quand tout le reste semble se dérober (cf. encadré). Dès lors, « ouvrir des possibles aux gens » (catégorie C, communes de plus de 30 000 habitants, maison de quartier), aider « chaque individu à devenir ce qu’il peut » (catégorie C, commune de moins de 10 000 habitants, Atsem), « donner le coup de pouce qui relance » (catégorie C, conseil départemental, assistante service social) animent dorénavant l’implication de chacun… Il s’agit moins d’assister que d’accompagner, moins de soutenir que de renforcer les capacités : « empowerment des citoyens », FPT et agents sont là pour transformer les conditions d’existence et permettre aux bénéficiaires de reprendre la main sur celle-ci.
Utiles face au fonctionnaire bashing
Las, la réalité échappe parfois aux cadres théoriques. Les territoriaux n’hésitent pas alors à « bricoler » avec la réalité, faisant preuve d’une réactivité et d’une adaptabilité bien plus importantes que celles qui leur sont généralement prêtées… Certes, ils le font pour ne surtout pas trahir l’utilité de cette mission qu’ils ont chevillée à l’esprit. « Mais cette capacité d’ajustement constitue aussi un trésor culturel historique dans lequel puiser pour faire face aux forts enjeux d’adaptation actuels », pointe Jérôme Grolleau, sociologue et auteur de l'étude. Des enjeux d’efficience et de performance qu’ils entendent d’ailleurs bien mieux qu’on ne pourrait le supposer, tout entiers tendus vers un nouvel objectif : reconquérir la reconnaissance publique, élément fondamental de la santé et de la qualité de vie au travail*. Aux managers donc de les y aider, en leur permettant de faire une démonstration sans appel de leur action !
- *Lire « La reconnaissance monétaire au travail, un nouveau territoire » (Les Cahiers de l’OST n°11 - mars 2014)
- Toutes les citations anonymisées sont issues de l’étude de l’OST.
La force existentielle du quotidien
VUCA. Inventé par l’armée américaine, l’acronyme issu des mots anglais Volatility, Uncertainty, Complexity et Ambiguity résume l'instabilité de notre environnement, dont les crises, menaces et mutations rendent toute visibilité impossible. Or, ces bouleversements finissent même par ébranler notre quotidien, ce périmètre d’existence jusqu’alors intouchable et où depuis l’enfance, nous nous forgeons et aguerrissons en toute sécurité avant d’affronter l’inconnu. En renouant avec ses racines ou en réinvestissant des liens locaux, retrouver cette assise devient donc une attente sociale majeure, quasi existentielle, à laquelle FPT et agents sont les premiers appelés à répondre en tant que « designers du quotidien ». Un rôle absolument crucial.
© MNT
Article publié le 20/06/2018
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