Le travail collaboratif, une démarche séduisante mais semée d’obstacles

Consacré aux modes de travail collaboratifs dans la fonction publique territoriale, le 30e Cahier de l’Observatoire MNT, Faire le pari du collaboratif, met en évidence l’impact positif que peut avoir cette démarche dans le fonctionnement des collectivités et dans l’exercice de leurs missions quotidiennes. Cette approche managériale novatrice ne permet pas seulement de moderniser, de fluidifier et de rendre plus efficiente l’action publique locale, elle constitue également une réponse à la quête de sens au travail exprimée par les agents.

Pourtant, la mise en place d’un projet collaboratif ne va pas de soi. Il s’agit, en effet, d’un processus long et complexe qu’il convient de construire pas à pas, en levant les nombreux obstacles susceptibles d’apparaître à chaque étape. Le guide managérial, réalisé par l’Observatoire MNT, en partenariat avec l’Institut national des études territoriales (Inet) et l’Association des administrateurs territoriaux de France (AATF), recense ainsi les freins qui peuvent entraver le déploiement des pratiques collaboratives. Elle montre aussi comment l’organisation territoriale peut débloquer les situations difficiles.

Le frein le plus fréquemment évoqué, lors des entretiens d’acteurs publics et des études de cas, porte sur la culture administrative traditionnelle qui marque profondément le fonctionnement de l’action territoriale. Une culture que les agents, les managers, les directions des collectivités et les élus doivent, sur bien des aspects, réinventer avant de mettre en place un processus collaboratif basé sur des pratiques transversales et coopératives.

Poids des contraintes et lourdeurs administratives

Construite sur de multiples cloisonnements et une organisation des compétences en silo, la territoriale n’accepte pas spontanément les injonctions à imaginer d’autres modèles managériaux visant à favoriser l’autonomie et l’inventivité. Face au défi du travail collaboratif, la collectivité se trouve donc dans l’obligation de se transformer et de faire évoluer son organisation. L’Observatoire MNT pointe la difficulté de l’exercice en soulignant que « le fonctionnement traditionnel en silo revient vite, surtout quand la fatigue, la surcharge de travail et l’usure reprennent le dessus ». Contre le risque de démotivation des équipes, « il importe de constamment réinterroger, relancer, entretenir, réinventer le processus, pour ne pas laisser retomber la dynamique ».

Autre obstacle mis en évidence : le poids des contraintes et des lourdeurs inhérentes au fonctionnement de l’administration publique locale. Sont cités notamment « les calendriers des instances de gouvernance, les cycles budgétaires, les circuits de validation ou les processus réglementaires ». Autant de freins qui, ajoutés à la charge de travail et au rythme soutenu des réformes et des projets, peuvent faire hésiter la collectivité à expérimenter des process coopératifs.

Une organisation opérationnelle à repenser

Il convient donc pour l’entité territoriale de bien préparer en amont sa démarche collaborative, notamment en définissant très précisément ses objectifs et en mettant en place un environnement de travail adapté afin d’assurer la durabilité de ce mode de fonctionnement. A noter que les outils numériques utilisés à bon escient (téléphones et ordinateurs portables, plateformes collaboratives, logiciels de partage de documents…) peuvent s’avérer un point d’appui précieux grâce auquel agents et managers peuvent intervenir et interagir à distance.

Par ailleurs, les auteurs de l’étude citent le coût financier de la démarche collaborative comme l’un des écueils susceptibles d’entraver sa mise en place. « Le bénéfice n’est pas suffisamment perceptible et matérialisable pour justifier la dépense, laquelle n’est pas facile à évaluer. »

Reste que si le travail collaboratif apparait comme « un outil à l’efficacité ciblée, et non une finalité en soi », cette pratique s’avère peu compatible avec un fonctionnement directif. Elle supporte difficilement les rôles peu ou mal définis, notamment ceux des élus et chefs de service. En outre, selon l’étude de l’Observatoire MNT, le processus collaboratif s’accommode mal d’un contexte de fragilité interne à la collectivité, notamment dans le cadre de situations sociales conflictuelles.

30e Cahier de l'Observatoire MNT : la méthodologie

Le 30e Cahier de l’Observatoire MNT repose sur 28 entretiens individuels menés auprès d’un échantillon varié de 21 structures dans la territoriale, l’armée et la fonction publique hospitalière. Quatre études de cas, fondées sur des entretiens croisés au sein de collectivités territoriales, complètent l’étude : Département du Val d'Oise, Métropole européenne de Lille, Smicval, Caluire-et-Cuire. Les bonnes pratiques des 21 structures sont résumées en annexe de l’étude.

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Article publié le 19/01/2024

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